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Quand une adresse IP vous bloque le chemin : retour d’expérience et coup de gueule

Un homme en pull sombre fait face à un mur de briques rouges et tente de coller ou récupérer une enveloppe stylisée affichant un grand pictogramme d’e-mail. L’image évoque une métaphore visuelle d’un message bloqué ou filtré, possiblement par un pare-feu numérique, avec un fond sombre rempli de chiffres binaires en arrière-plan.

Il m’aura fallu près d’une semaine, plusieurs échanges en anglais, des justificatifs techniques et une bonne dose de patience pour débloquer une situation absurde : faire lever un blocage sur une adresse IP que je venais pourtant d’acquérir, mais que Microsoft avait jugée indésirable.

Une IP « propre »… en apparence

Tout commence lorsque je déploie un serveur pour héberger plusieurs de mes sites, dont certains à vocation commerciale.
L’hébergeur m’attribue une adresse IP. Jusque-là, rien d’anormal.
Mais très vite, je constate que mes e-mails — pourtant légitimes, transactionnels, et signés — ne parviennent pas aux boîtes des utilisateurs de Microsoft (Outlook, Hotmail, Live, etc.).

Pas d’erreur côté serveur, aucun rejet visible dans mes journaux. Pourtant, après un test SMTP, le verdict tombe : l’IP est bloquée par Microsoft, pour une réputation jugée mauvaise. Sauf que… je n’ai rien envoyé avec encore.

Le parcours du combattant commence

Je contacte le support de Microsoft via leur formulaire « Postmaster ». Je fournis les éléments demandés : le type d’utilisation, les mesures mises en place (SPF, DKIM, DMARC), la bonne configuration du serveur. Et surtout, je joins un document de mon hébergeur confirmant que je suis le nouvel utilisateur de l’adresse IP, accompagné d’une facture en bonne et due forme.

Mais la réponse est cinglante : « not qualified for mitigation« . En clair : non, on ne débloque pas. Et pourquoi ? Parce que l’IP aurait eu un comportement problématique par le passé. Peu importe que je n’y sois pour rien. Peu importe que je n’aie jamais envoyé le moindre e-mail douteux.

Microsoft demande alors un e-mail dans un format précis (et absurde), exigeant que mon fournisseur écrive exactement : « The IP [xxx.xxx.xxx.xxx] was assigned to [Nom / Domaine] on DD/MM/YYYY » Comme si un document officiel et une facture n’étaient pas suffisants.
À ce moment-là, j’ai failli abandonner.

L’injustice systémique des IP recyclées

Cette expérience m’a révélé à quel point le système actuel de gestion de la réputation IP est toxique.

Les grandes plateformes (Microsoft, Google, Yahoo, etc.) ont mis en place des systèmes automatisés de blocage pour contrer le spam. C’est compréhensible.
Mais ces systèmes ne tiennent pas compte de la réalité du terrain, et surtout ne permettent pas de réhabilitation rapide pour les utilisateurs légitimes qui récupèrent une IP « usée ».

C’est un problème fondamental, et les hébergeurs doivent en assumer une part de responsabilité.

OVH, Scaleway, et les autres : vous devez agir

De nombreuses adresses IP sont aujourd’hui compromises à cause de l’activité douteuse d’anciens utilisateurs. Mais lorsqu’un nouvel utilisateur hérite de l’IP, il hérite aussi des ennuis.
Pourquoi les hébergeurs continuent-ils de redistribuer ces adresses sans précaution ?

Pourquoi n’existe-t-il pas une procédure de « nettoyage de réputation » avant réattribution ? Pourquoi, surtout, ne suspend-on pas automatiquement les comptes qui génèrent des centaines de plaintes de spam avant que le mal soit fait ?

Il est temps que les grands acteurs — OVH en tête — mettent en place de vraies politiques de suivi, de responsabilisation, et de blocage proactif avant que leurs plages d’adresses ne soient toutes bannies.

Et l’IPv6 dans tout ça ?

La pénurie d’adresses IPv4 aggrave le problème. Les nouvelles entreprises n’ont d’autre choix que de recycler des IP qui traînent parfois un lourd passé, comme un casier judiciaire numérique.

Et pourtant, l’IPv6 pourrait changer la donne, avec des milliards d’adresses disponibles. Mais son déploiement reste trop lent, mal supporté par certains services, et sous-utilisé par les grands hébergeurs.

C’est une course contre la montre. Plus on attend, plus le coût de la mauvaise réputation numérique devient lourd à porter pour les petites structures comme la mienne.

un système inhumain à réformer

Je finirai sur une note personnelle : j’ai finalement obtenu le déblocage. Après avoir exprimé, poliment mais fermement, mon agacement à Microsoft, ils ont fini par transmettre mon dossier à une équipe supérieure, qui a appliqué une « mitigation« . Mon IP sera débloquée dans les 48 heures.

Mais combien d’autres, comme moi, auront abandonné avant d’y parvenir ? Combien d’entreprises perdent des clients parce que leurs mails ne passent plus ?

Combien de développeurs, de commerçants, d’auteurs, de créateurs sont pénalisés pour des fautes qu’ils n’ont pas commises ?
Il est temps que l’on réhumanise la gestion technique de l’e-mail, et que les géants de la tech, tout comme les hébergeurs, se rappellent qu’à l’autre bout de la ligne, il y a des gens. Pas juste des IP.

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